Cet article est une retranscription d'une interview, sans modification, entre Clara encadrante à l'école et Baptiste, 18 ans, un membre de notre école.
C’est quoi la démocratie pour toi ?
"Pour moi la démocratie c’est un concept réfléchi, c’est à dire que c’est un autre style d’autorité, où on n'est pas obligé en fait. Ça part du principe que chaque individu a envie d’évoluer et qu’on n’est pas obligés de recevoir des ordres de quelqu’un, surtout quelqu'un qui ne connait pas ta vie. Dans l’école du coup, tu ne peux pas recevoir d’ordre mais t’as un certain nombre de choses à respecter, il y a des règles à respecter pour que ça fonctionne. Pour que ça marche, il faut participer.
Avant, combien de fois je suis tombé sur des règles qu’il fallait respecter juste parce-que c’était “les règles”. Par exemple, interdire un enfant d’aller aux toilettes en cours alors que ça l’empêche de se concentrer. Je pense qu'il faut être flexible en fonction du contexte : autrement, cela apporte plein de problèmes et débouche souvent sur une injustice. Pour moi, la justice est très importante, voir primordiale, pour vivre avec les autres. Quand on fait une bêtise, ce n'est pas juste “oui tu n'a pas respecté cette règle inscrite dans le règlement”, ça sert aussi à expliquer en quoi cela dérange les autres et cela doit être justifié en fonction du contexte. Quand les personnes concernées sont vraiment en tort et qu’elles ne l'acceptent pas, c'est là que des sanctions doivent être décidées par toutes les personnes. Mais si les règles n’ont pas d’explication, plus de sens, cela pousse, dans mon cas personnel, à tester toujours plus, pour essayer de faire comprendre à la personne qui sanctionne, qui contraint, que ce n’est pas la bonne méthode. Lui faire comprendre qu’il faut savoir s’adapter aux situations et faire attention aux injustices.
Je pense que c’est une des raisons des problèmes dans la plupart des écoles de l’éducation traditionnelle, surtout pour ceux qui ont envie de vivre leur jeunesse.
Qu’est ce que tu répondrais à quelqu’un qui te dirait “c’est une école où les gens font ce qu’ils veulent ?”
Je répondrais qu’en fait tu peux faire ce que tu veux mais que ta liberté s’arrête là où celle des autres commence. Par exemple au niveau du ménage, bah t’es libre de faire un dessin et d’en mettre de partout mais après tu dois ranger. T’es libre de regarder un film, mais après tu ne peux pas l’écouter fort.
Et si quelqu’un ne veut pas ranger, comment tu fais si il ne veut pas ranger ?
Haha bah si elles veulent pas ranger bah... je pose une plainte. Et j’attends que ça passe en conseil de justice où des sanctions/solutions vont être proposées.
Et toi, comment tu arrives à gérer le fait que cela ne soit pas forcément rangé directement ?
Bah moi personnellement ça me dérange pas, (rires) je sais ça peut être égoïste mais si c’est les parties communes ça va. Mais après c’est sûr que si cela se passait dans un endroit confiné, qu’une personne commence à abîmer ou utiliser mes affaires, là ça me dérange. Je leur dirai “bah vous avez votre zone, moi j’ai ma zone”. Voilà c’est ça, “ta liberté commence là où s’arrête celle des autres” on le voit bien là, ce concept. C’est vraiment un truc que t’apprends dans cette école.
C’est quoi le travail pour toi ?
Pour moi le travail ce n'est pas quelque chose qu’on te dit de faire. Par exemple, personnellement, j’ai du mal avec le fait qu’on me donne des ordres, d’avoir un patron qui te crie dessus et tout. Mon idéal, ça serait de travailler pour mon rêve à moi, pouvoir compter sur moi-même, être autonome. J’ai pas envie de contribuer au rêve de quelqu’un d’autre. C’est personnel. J’ai pas envie de travailler pour quelqu’un d’autre. Après t’es obligé des fois… mais je veux d’abord travailler pour moi. Diriger les autres, faire en sorte que ça tourne. J’accepterai les responsabilités. Après le travail idéal, c’est un concept assez vaste parce que j’ai 18 ans et j’ai encore du temps, et puis je vais surement changer dans ma vie… mais en tout cas, j’ai envie d’être patron ! J’ai envie d’être auto-entrepreneur, après c’est un rêve un peu grand mais voilà, je pense qu’il y a des étapes. Pour les secteurs, j’ai plusieurs idées mais je ne préfère pas en parler tant que ce n’est pas sûr.
Pour toi dessiner est ce que ça peut être considéré comme du travail?
Je pense que tout peut être considéré comme un travail tant que tu fais les bonnes choses pour gagner de l’argent. Par exemple si tu veux devenir artiste plus tard, mon père il est artiste-peintre et il gagne de l’argent comme ça. Donc le travail pour moi c’est aussi une notion d’argent.
Mais après c’est pas qu’une notion d’argent, par exemple quand j’étudie, pour moi, je travaille, même si c’est aussi pour plus tard gagner de l’argent.
Et qu’est ce que tu répondrais à une personne qui dit que cette école c’est une école où les gens ne travaillent pas ?
Je leur répondrais que tôt où tard des personnes commencent à s’y mettre, à se demander ce qu’elles veulent faire plus tard. Elles vont toutes devoir faire un choix “soit je continue à ne "rien faire", soit je me mets explorer quelque chose”. Et si elles font le premier choix, c’est leur problème, leur responsabilité, bah c’est leur vie quoi, c’est elles qui décident ! Je vais pas les juger et je pense que c’est à elles de se donner les moyens de réussir !
La chose la plus importante pour moi c'est la motivation. Avoir un objectif quelconque qu’il soit précis ou non. Et pour cela je pense qu'il faut prendre du temps pour découvrir des passions et des activités plaisantes et non pas le perdre bêtement - de mon point de vue - dans des cours dont tu oublies la moitié. Parfois, juste “rien faire” peut apporter beaucoup de connaissance de soi. Car pour beaucoup de personnes d'après mes discussions, le fait de ne “rien faire” rend triste ou devient déprimant au bout d'un moment. Et c'est à ce moment là que les personnes concernées décident de se prendre en main. La motivation, c'est personnel ça vient de soi, on ne doit pas la forcer, mais à la limite montrer tous les bénéfices que la personne concernée peut en tirer. Voilà."
Baptiste a souhaité joindre la citation suivante à cet article.
"Je considère, disait Schwab, mon pouvoir d'éveiller l'enthousiasme chez les hommes comme mon capital le plus précieux. C'est en encourageant l'individu qu'on révèle et qu'on développe ses meilleurs dons. Rien ne tue davantage l'ambition d'une personne que les critiques de ses supérieurs. Je ne réprimande jamais personne. Je crois qu'il vaut mieux stimuler, donner aux êtres un idéal à atteindre. C'est pourquoi je suis toujours prêt à louer et je déteste gronder si je trouve une chose bien faite, j'approuve sincèrement et je prodigue des compliments "
Comment se faire des amis - Dale Carnegie
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